Un nouvel outil pour l’amélioration des plantes

Un nouvel outil pour l’amélioration des plantes

Mobilisation contrôlée des éléments transposables.

Les éléments transposables ont été découverts par Barbara McClintock chez le maïs il y a plus de 70 ans déjà. Parce que ces éléments génétiques mobiles du génome pouvaient influencer les patterns de coloration chez le maïs, elle les nomma aussi éléments contrôleurs. Aujourd’hui on sait que les éléments transposables sont responsables pour toute une panoplie de traits importants chez les plantes cultivées. Les éléments transposables ont la possibilité de créer des nouvelles copies de soi-même qui peuvent ensuite se réintégrer dans le génome. Pour protéger leur génome, les plantes limitent la mobilité des éléments transposables à travers divers mécanismes épigénétiques (par exemple la méthylation de l’ADN est une marque épigénétique centrale dans la répression des éléments transposables).

Pour aussi limiter la mobilité des éléments transposables au niveau des ARNs, plusieurs ARN polymerases dédiés à la défense contre les éléments transposables ont évolué dans les plantes. Ici nous démontrons que l’ARN polymerase II, qui produit tous les ARNs messagers de la cellule, joue aussi un rôle central dans la répression de l’activité des éléments transposables.

Le réchauffement climatique menace les plantes cultivées : les stress environnementaux (sécheresse, pluies importantes, gelées tardives) s’amplifient, entraînant des pertes agronomiques importantes. Avec certaines limitations comme l’interdiction des OGM dans certains pays, méthode alternative d’amélioration des plantes, de nouvelles approches sont développées. Dans le processus évolutif naturel des plantes, les éléments transposables jouent un rôle central dans l’adaptation des plantes aux stress : ils ont la capacité de modifier la réponse des plantes aux stress et peuvent donc contribuer à adapter les plantes à leur environnement, en particulier climatique. Jusqu’alors il était impossible de contrôler les éléments transposables pour les utiliser de manière ciblée en amélioration végétale ; ce verrou a maintenant pu être débloqué.

En effet un nouveau mécanisme épigénétique qui réprime l’activité des éléments transposables chez les plantes a été découvert. Ce mécanisme inclut une enzyme importante pour la production des ARNs messagers des plantes. Par un simple traitement des plantes avec une molécule qui supprime l’activité de cette enzyme, les éléments transposables ont pu être utilisés pour créer de la variabilité phénotypique chez Arabidopsis thaliana (voir figure). Nous avons démontré que cette molécule permet d’utiliser les éléments transposables non seulement chez une plante modèle mais aussi chez le riz, une plante essentielle pour l’alimentation humaine. Cette méthode peut donc en théorie fonctionner chez toutes les plantes.

Pour la première fois, il est maintenant possible d’activer le potentiel évolutif des plantes régulé par les éléments transposables et ce de manière contrôlée. La méthode a été brevetée. La prochaine étape sera de tester si ce potentiel peut être utilisé pour améliorer d’autres plantes cultivées. Un projet européen ERC (European Research Council) Consolidator (BUNGEE) de cinq ans vient de démarrer pour tester cette approche.

Partenaires :

  • Michael Thieme, Université de Bâle (Suisse)
  • Marie Mirouze et Sophie Lanciano, Institut de Recherche pour le Développement, UMR232 DIADE Diversité Adaptation et Développement des Plantes, Université Montpellier et University of Perpignan, Laboratory of Plant Genome and Development (France)
  • Sandrine Balzergue, Nicolas Daccord et Etienne Bucher, UMR IRHS, Inra - Agrocampus Ouest - Université d'Angers

Référence de la publication : Thieme, M., Lanciano, S., Balzergue, S., Daccord, N., Mirouze, M., and Bucher, E. (2017). Inhibition of RNA polymerase II allows controlled mobilisation of retrotransposons for plant breeding. Genome Biol 18, 134.

Brevet : WO2017093317A1